accueil du site / Ensemble du livre : biographie de François Nespola, 1858-1911

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Urbain Bouroul, grand séducteur de ces dames

Avant le coucher du soleil, la fête est finie. Barthélémy et Costanza s'éclipsent discrètement. Tout le monde sourit ! Ils se mettent déjà au travail pour nous faire de beaux petits ! Xavier Auda et Françoise Lombard, les parents du marié ne rêvent que de ça, voir les enfants de leur fils unique gambader dans la cour. L'avenir de leur nom sera assuré. et si les jeunes savent s'y prendre, ils feront prospérer la propriété. Pas de doute à ce sujet, courageux et pleins d'idées, ils réussiront. Costanza n'est pas riche mais c'est la femme qu'il faut pour leur fils. Saine, travailleuse et si gentille avec eux. C'est une belle-fille en or, la fille qu'ils auraient rèvé d'avoir si le moule ne s'était pas cassé à la naissance diificile de Barthélémy.

Francesco et Anselme Gilli, le boulanger raccompagnent Gian Franco Falicon. Le boulanger charrie un peu Francesco : .

— Elle te plaît, on dirait, la petite Catherine .

Francesco surpris, rougit et manque de trébucher. Effectivement Catherine est petite, pas très belle. Moins belle que Costanza mais elle a toute sa gentillesse, un peu la gentillesse aussi de son père Carlo, ce grand absent du mariage et de Cattarina, sa mère. Il aimerait se blottir contre la poitrine abondante de Catherine, y trouver du réconfort, lui confier ses secrets, bâtir une nouvelle vie ...

— Hé petit, fais attention ! Ce n'est pas le moment de me laisser tomber. Et puis ne te fais pas trop d'illusions.

Le vieux n'en dit pas plus mais cela intrigue Francesco. Quand Anselme les laisse enfin seuls, Francesco demande :

— des illusions, qu'est-ce que tu veux dire par là ? Je suis pas assez bien pour Catherine ? Pourtant, ce n'est pas ce qu'elle a l'air de penser et sa mère non plus. Je l'ai vu dans leurs yeux et en plus elles m'ont particulièrement gâté : j'ai eu au moins trois parts de gateau et à peine je réussissais à vider mon verre qu'elles le remplissaient.

— Hé Oui, je l'ai vu moi aussi, leur manège. Tu plais à la mère et à la fille. Mais ...

Son éclat de rire se finit par une quinte de toux violente. Francesco s'énerve, "qu'est-ce qu'il dit là, le vieux. Je pensais qu'il me soutenait, qu'il était mon ami et là, il se moque." . Avant que Gianfranco ne s'étouffe définitivement, Francesco lui porte un verre d'eau et le regarde déçu, trahi même.

— petit, ne te fâche pas ! Le problème ce n'est pas toi, ni Catherine, ni sa mère. Le problème, c'est le vieux Bouroul. Tu sais ce vieux c'est un vrai lascar. je ne pouvais pas t'en parler en présence du boulanger car ça touche sa famille. Bien qu'il n'en pense pas moins, lui aussi, de son ex beau-père.

Francesco ne semblait pas au courant. Alors Falicon lui raconta la vie mouvementée de Bouroul et Francesco comprit un peu mieux le regard noir que lui avait lancé Urbain Bouroul, quand il les avait vu passer, bras dessus, bras dessous avec Catherine, sa cavalière de noce.

— Mossieur Urbain Bouroul, de son vrai nom Alban Borol, porte bien le costume et s'affiche plus français encore que les Français. Il faut dire qu'ils venaient de Cannes, les parents et que dans la famille, on parlait le Français. Mais cela ne les avait pas enrichis. Pauvres comme Job et avec toute une marmaille à nourrir avec les seuls revenus du métayage et des quelques légumes vendus à la sauvette. Moins riche que nous, ce prétentieux. Nous on sait bien qu'il vient du port de Nice et que comme nous tous, il a fait les quatre-cent coups avec les gamins de son âge. Sa fortune de bourgeois aisé, il n'en a pas hérité, elle lui vient des femmes. Ce beau moustachu a commencé par consoler la veuve Gilli, tu ne l'as pas connue, c'était la mère d'Anselme. Certes, elle était de dix ans plus vieille que Bouroul. Un peu hors d'âge, à quarante sept ans, malgré les emplâtres de maquillage .... pas totalement naïve, elle savait que cet alerte prétendant convoitait son argent et risquait de s'envoler dès fortune faite. Il avait des défauts mais sa jeunesse et sa vigueur apportaient du renouveau dans la vie d'Angélica. Entre ses bras, elle se sentait d'une nouvelle jeunesse, la vie s'accélérait et d'ailleurs, il avait fallu faire vite pour régulariser la situation. Elle était enceinte. Le notaire avait mis un temps fou à établir les papiers établissant la liste de ses biens, Urbain les avait signés en reconnaissance de dettes. Une semaine après, ils s'était mariés et une semaine après, leur fille Marie était née.

Ainsi ficelé, Borol avait dû rester calme mais dix ans après, à la mort d'Angelica, il n'avait pas attendu longtemps por se remarier avec Françoise Falicon, la propriétaire du terrain et de leur maison actuelle. Moins d'un an. Qui sait s'ils ne se fréquentaient pas déjà du vivant d'Angelica ! Il doit avoir des dons cachés pour séduire les femmes celui-là. À cinquante ans, il n'était pas de première jeunesse !

Maintenant, avec cette fortune durement acquise dans le lit de ses belles, il surveille étroitement ses filles. Elles doivent faire de beaux mariages. Pour Antoinette, il a accepté Vincent Martin comme gendre. La famille Martin est riche et bien réputée à Carras. Vincent est vieux mais, heureusement, c'est un chic type et un bon mari pour Antoinette. Elle n'a pas à se plaindre du choix de son père.

— Alors moi, je n'ai aucune chance, conclut tristement Francesco.

— Arrête ! Elle t'aime, ce coup de foudre, ça se voit ... Dommage, vu mon âge, je ne verrai probalement pas le mariage mais, avec ses soixante dix huit ans, le vieux Bouroul ne sera pas éternel non plus.

Sur ce, ils allèrent se coucher. La joie de Francesco était retombée. Cette douche froide l'avait dégrisé. Avec le vin de la noce, il s'était pris trop vite à rèver.



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Bonne lecture !


Documentation

Aussi surprenant que cela puisse paraître, bien qu'un peu brodée, l'histoire est réelle. Les archives en témoignent :